Lemoine, une loi bien trop méconnue par les Français ?

Juliette Hisler copywriter
Publié le , mis à jour le par Juliette Hisler - Copywriter finance et assurance

Il y a un an, nous revenions sur les premières conséquences de l’entrée en vigueur en 2022 de la loi Lemoine. Cette loi qui permet notamment aux emprunteurs de changer à tout moment leur contrat d’assurance de prêt.

Véritable avancée dans le monde de l’assurance emprunteur, déjà bien chahuté par de précédentes et nombreuses dispositions légales, la loi Lemoine visait « un accès plus juste, plus simple et plus transparent du marché. »

Et pourtant, à l’heure où la loi Lemoine fête ses deux ans, le bilan semble mitigé, et les acteurs du marché sont plus ou moins d’accord sur ses effets.

La rédaction d’Ymanci s’est retroussé les manches pour tenter d’y voir plus clair.

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Assurance emprunteur : le bilan très positif de la loi Lemoine

C’est ainsi qu’était titré le communiqué de presse du CCSF, Comité Consultatif du Secteur Financier, daté du 15 janvier 2024.

Cela fait deux ans maintenant que la loi Lemoine est entrée en vigueur et qu’elle permet aux personnes ayant souscrit un crédit immobilier et une assurance qui lui est adossée de changer de contrat de couverture, sans avoir à attendre que la première année de souscription se soit écoulée (loi Hamon) ou qu’arrive la date anniversaire du contrat (loi Bourquin).

Car des lois pour donner la possibilité aux emprunteurs de choisir et de résilier leur contrat, il en existe pléthore en France.

Mais cessons de divaguer et revenons à notre sujet principal : la loi Lemoine et son bilan.

De nombreuses demandes de changement d’assurance

D’après le communiqué de presse du CCSF donc, la loi Lemoine remporte un plein succès (1) :

Les demandes de substitution ont augmenté de plus de 80 % entre 2021 et le premier semestre 2023.

Par substitution comprenons simplement changement, car si en effet vous pouvez désormais résilier votre contrat d’assurance à tout moment, vous ne pouvez le faire qu’au profit d’un autre, qui soit dit en passant doit répondre au principe de l’équivalence de garanties.

Autrement dit, vous pouvez changer de contrat d’assurance emprunteur pour un autre contrat, plus adapté à vos besoins ou moins cher, mais ce dernier doit présenter des garanties de couverture au moins égales à celles de l’ancien contrat.

Des demandes de changement d’assurance pour tout le monde ?

Malgré ce bilan encourageant, le CCSF ne cache pas les limites rencontrées par la loi Lemoine depuis sa mise en application.

D’après l’analyse des données recueillies par le CCSF auprès de ses membres, il semblerait que les demandes de substitution ne profitent pas à tout le monde.

58 % des substitutions d’assurance et 69 % des contrats d’assurance alternatifs externes souscrits à l’octroi du crédit seraient portés par les profils les plus aisés, alors qu’ils ne représentent que 27 % des crédits immobiliers des portefeuilles bancaires.

Un point donc qui mérite de trouver des solutions palliatives. Affaire à suivre donc…

Les assurances alternatives externes, grandes gagnantes ?

Si nous savons que les demandes de changement d’assurance de prêt immobilier concernent principalement les populations plus aisées, savons-nous vers qui elles se tournent pour concrétiser ces changements ? Une compagnie assurantielle externe ou leur propre banque ?

Toujours dans son communiqué de presse, le CCSF nous apprend que :

Le nombre de contrats alternatifs externes a augmenté de plus de 215 000 contrats en 17 mois, dont 117 000 pour la seule période de janvier à mai 2023.

Une augmentation qui permet aux assurances externes de passer d’une part de marché de 15,3 % à 16,1 %, laissant penser que les établissements prêteurs restent très majoritaires dans le choix de l’assurance de prêt de leurs clients.

Des résultats à modérer selon les compagnies d’assurance elles-mêmes

L’augmentation fulgurante du nombre de demandes de substitution (+80 %) est incontestable. Pourtant, certains acteurs du marché émettent quelques bémols et évoquent notamment un manque d’information certain sur le dispositif Lemoine.

La majorité des emprunteurs informés de leur droit de changer d’assurance à tout moment

L’étude menée par Assurly et PwC met en évidence que 66 % des personnes interrogées, sur un échantillon de 1 000 personnes, savent qu’elles peuvent changer d’assurance à tout moment.

Un chiffre qui tombe à 53 %, d’après l’étude menée, elle, par l’Argus de l’assurance et April (2), lorsque l’on demande aux interrogés s’ils connaissent la loi Lemoine.

Un écart important, c’est certain, mais qui nous permet de conclure que la loi Lemoine mériterait d’être davantage connue dans ses applications. À ce titre, et toujours d’après l’étude de l’Argus de l’assurance, près des deux tiers des personnes interrogées détenant un crédit depuis moins d’un an disent avoir été informées par leur banque du droit à changer d’assurance, alors qu’elles ne sont que 35 % à l’avoir été parmi celles détenant un prêt depuis cinq à dix ans.

C’est bien trop peu quand on sait que la loi impose aux établissements prêteurs d’informer les emprunteurs de leur droit de changer d’assurance.

La suppression du questionnaire de santé, une mesure passée à la trappe

Jusqu’à présent, nous n’avons parlé que du droit de l’emprunteur à changer de contrat sans préavis et ni condition de délai. Or, la loi Lemoine, c’est aussi la possibilité de souscrire une assurance de prêt sans avoir à remplir un questionnaire de santé.

Réservée aux prêts inférieurs ou égaux à 200 000 € remboursés avant 60 ans, la suppression de la sélection médicale est une mesure bien mal connue par les emprunteurs. Un fait partagé par les études que nous avons précédemment citées.

Selon Pwc pour Assurly, 48 % des participants savent, que grâce à la loi Lemoine, il n’existe plus de questionnaire de santé pour souscrire à une assurance de prêt immobilier. Ils sont 42 % d’après l’étude de l’Argus de l’Assurance avec April.

En bref, et même si tous ces chiffres peuvent laisser perplexes, se pose véritablement la question de la connaissance des contours de la loi Lemoine auprès des emprunteurs. Car si plus de la moitié d’entre eux disent la connaître, savent-ils exactement ce qu’elle implique ?

Nous n’avons pas toutes les informations pour répondre à cette question, mais ne manquerons pas de vous informer le temps venu.

Vous voulez en savoir plus sur les mesures mises en place par la loi Lemoine, cet article est fait pour vous :

 

(1) Le bilan en assurance emprunteur 2023 du CCSF est exclusivement construit sur la base des contributions de l’ensemble des membres du CCSF, collectées et analysées par le cabinet de conseil Actélior entre février et septembre 2023 et relatives aux productions et portefeuilles des années 2021, 2022 et 2023 arrêtées à mai 2023 : contributions qualitatives, fondées sur les réponses aux questionnaires soumis à l’ensemble des acteurs, et quantitatives, à partir de données de portefeuilles bancaires d’une part et de tarifs transmis par l’ensemble des acteurs d’autre part.

(2) Étude réalisée en ligne par un questionnaire auto-administré auprès d’un échantillon de 1 000 répondants représentatif de la population nationale du 17 au 28 avril 2023.