Motion de censure adoptée : les conséquences sur l’immobilier
Le Premier ministre, Michel Barnier, et son gouvernement sont contraints à la démission après l’adoption d’une motion de censure à l’Assemblée nationale, ce mercredi 4 décembre aux alentours de 20 h 30, déposée immédiatement après le déclenchement de l’article 49.3 de la Constitution, par celui qui était encore hier le locataire de Matignon, pour faire passer en force le projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
Cette motion de censure, adoptée à 331 voix, risque de plonger la France dans une incertitude politique et budgétaire. Cette motion de censure va-t-elle entraîner des conséquences sur le logement et l’immobilier, qui est l’un des moteurs de l’économie et de l’emploi en France ? La question est plus que jamais d’actualité puisque le projet de loi de finances 2025, dont le texte contenait des mesures importantes pour les professionnels de l’immobilier mais aussi pour les prétendants à l’accession à la propriété, n’a pas été voté.
Repassons en revue quelques mesures sur lesquelles comptaient des professionnels de l’immobilier, notamment les promoteurs et les artisans, mais aussi les consommateurs, pour se relancer. Que va-t-il donc advenir ?
De l’élargissement du prêt à taux zéro (PTZ) ?
Un amendement remontant au 26 octobre prévoyait l’élargissement de ce prêt aidé à tout le territoire et aux logements neufs aussi bien individuels que collectifs. Depuis plusieurs mois, le PTZ était effectivement limité aux emprunteurs acquéreurs d’un appartement neuf en zone tendue. Dans les zones détendues, ce prêt sans intérêt et sans frais de dossier pouvait être accordé à condition d’acheter un logement ancien et d’y effectuer des travaux de rénovation énergétique. Quant aux maisons individuelles, elles n’étaient plus éligibles au PTZ.
Cette mesure, qui aurait dû entrer en fonction le 1er février 2025, visait à accroître de 50 % les bénéficiaires du PTZ. Selon les professionnels évoluant dans le secteur de la construction, cette mesure aurait également permis de bâtir de 20 000 à 25 000 logements neufs supplémentaires dont 15 000 maisons en 2025.
Rappelons que le secteur de la construction est en berne après avoir perdu au moins 40 000 emplois, cette année. Quant à la baisse des permis de construction, elle persiste. En effet, l’objectif de 250 000 mises en chantier en 2024 ne sera, selon toute vraisemblance, pas atteint. Si les choses restent en l’état, la Fédération française du bâtiment (FFB) estime que l’hécatombe continuera l’année prochaine avec 150 000, voire 300 000 emplois supprimés, si elle inclut dans les chiffres le secteur des matériaux de construction.
L’élargissement du prêt à taux zéro, couplé à la baisse des taux d’intérêt, aurait pu également faciliter l’accès à la propriété pour les primo-accédants qui voulait acquérir leur première résidence principale.
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De l’exonération fiscale pour les successions et les donations parentales d’un logement neuf ?
En octobre dernier, les députés avaient évoqué un amendement budgétaire proposant d’exonérer de droits de mutation à titre gratuit les donations familiales aux enfants et petits-enfants si ces sommes d’argent servaient à financer l’achat d’une résidence principale dans le neuf. Ils auraient pu ainsi leur transmettre ce bien sans verser les taxes généralement appliquées ? Il était prévu que cette exonération aille jusqu’à 150 000 € par donateur (parents ou grands-parents) et par donataire. Outre l’achat d’un logement neuf, cet amendement était soumis à plusieurs conditions :
- L’acte authentique devait être signé entre le 1er janvier et le 31 décembre 2025.
- Le logement devait faire office de résidence principale pour le donataire, à savoir celui qui reçoit l’argent, ou devenir une location en longue durée.
Cette mesure avait également pour but d’encourager l’achat de résidences principales, de favoriser l’investissement locatif ou de permettre aux jeunes ménages français, disposant d’un apport personnel insuffisant, de financer un tel projet afin d’accéder à la propriété.
De la baisse de la réduction de loyer de solidarité ?
Une mesure proposait de baisser de 200 millions d’euros la réduction de loyer de solidarité (RLS). Cette proposition de loi, sera-t-elle enfouie sous une pile de dossiers ? Si la mesure avait été votée, elle aurait permis de réduire la charge qui pèse sur les bailleurs sociaux. Cette réduction aurait également favorisé la relance de la construction et de la rénovation du parc immobilier. La RLS est un prélèvement effectué par l’État sur les recettes des bailleurs sociaux.
Le 28 novembre dernier, pendant un déplacement à Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis, où il est possible de devenir propriétaire d’un logement occupé par les sportifs du monde entier, cet été, durant les Jeux olympiques 2024 à Paris, Valérie Létard, encore ministre du Logement et de la Rénovation urbaine, avait alors expliqué :
Pour les bailleurs sociaux, cela a représenté une perte de 1,3 milliard d’euros par an depuis 2020, ce qui signifie moins d’investissement pour construire ou rénover le parc du logement social.
Du dispositif MaPrimeRénov’ ?
Certains acteurs de la rénovation énergétique voulaient que les fonds alloués à ce marché, proposant notamment le dispositif MaPrimeRénov’, souvent modifié ces dernières années, soient augmentés. La démission du gouvernement Barnier va-t-elle causer la fin des discussions ? Il faut savoir que sans l’élargissement de ces aides, de nombreux projets d’achat pourraient être reportés ou tomber à l’eau, tout simplement.
Du secteur de la rénovation énergétique ?
Le compte à rebours a commencé pour le secteur de la rénovation énergétique, sous pression depuis la loi Climat et Résilience. En effet, les décisions concernant les enjeux liés à la transition énergétique doivent être prises rapidement. Fin novembre 2024, les députés Bastien Marchive (Parti radical) et Inaki Echaniz (Parti socialiste) avaient redonné espoir aux propriétaires de passoires thermiques en réclamant notamment un assouplissement du calendrier du diagnostic de performance énergétique (DPE) pour les logements classés G, en copropriété.
Si les choses n’évoluent pas favorablement pour les propriétaires bailleurs, si ces derniers n’ont pas effectué les travaux nécessaires pour améliorer la note de leurs logements sur le DPE, ils devront les retirer de la location à partir du 1er janvier 2025. À cette date, les passoires thermiques G seront effectivement interdites à la location.
De l’assouplissement de la ZAN ?
L’assouplissement du dispositif Zéro Artificialisation Nette (ZAN) pourrait être également remis en question. Pourtant cette réforme devait favoriser la construction de logements près des zones d’activités économiques en l’adaptant aux objectifs environnementaux. Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment (FFB) a récemment admis :
Sans ce type de réforme, de nombreux projets immobiliers resteront bloqués, aggravant la pénurie de logements.
Après cette motion de censure adoptée, ces réformes, prévues au budget 2025, sont-elles en suspens ou vont-elles définitivement passer à la trappe ? Il est possible que certaines d’entre elles, jugées cruciales pour relancer notamment le marché du logement neuf, soient reprises par le prochain gouvernement.
En attendant la mise en place d’un nouveau gouvernement et la reprise des discussions autour du projet de loi de finances 2025, les mesures actuelles continueront de s’appliquer.
À suivre !